Quareat Al Fengan

d'après Loretta Strong de Copi

La tragédie de cette pauvre sublime dernière créature vivante qui oppose aux dangers cosmiques
qui la menacent son indestructible joie d’exister.

  Adulte   Troupe   Durée : 1 heures 15mn   Créé en septembre 2011   Déconseillé -16 ans


  • «Les excès sont justifiés par un jeu très juste et douloureux,
    à la hauteur du grand monsieur qu'était Copi.»

    Fernandvaux-le-penil sur BilletReduc

     
  • «Je suis parti dans un très beau voyage qui m'a complètement bouleversé !»
    Carlojustino sur BilletReduc

     
  • «Délirant, poétique et envoûtant !»
    Dortignac sur BilletReduc

     
  • «Un monologue troublant au service d'une mise en scène simple et intimiste.»
    Zazaza sur BilletReduc

     
  • «Un spectacle enrichissant, très émouvant et qui fait réfléchir.»
    Jila sur BilletReduc


L'équipe

  • Adaptation et mise en scène : Hazem El Awadly
  • Scénographie : Hazem El Awadly
  • Costumes : Hazem El Awadly
  • Musiques : Quareat al fengan, Abdel Halim Hafez, Gabbar, Abdel Halim Hafez
  • Photographie affiche : Charlotte Schousboe
  • Avec : Jefferson Eleutério

Intentions

La tragédie de cette pauvre sublime dernière créature vivante qui, oppose, aux dangers cosmiques qui la menacent, son indestructible joie d’exister, le drapeau jamais en berne de sa sexualité délirante, mi-fantasmée, mi-dévorante. Dernier témoin qui, à travers une communication hystérique, intime et pathétique, tente de sauver la vie ou du moins le monde.

Rien de plus réjouissant que de mettre en scène Copi. Dans le plaisir majeur d’être, avec spontanéité et fraîcheur, on voyage, on décolle. Sans angoisses ni frustrations mais sûrs de vouloir y arriver.

Autour d’un verre d’eau et d’une tasse de café, Quareat al fengan, ou Loretta, lit dans le marc. Elle parle à la terre, aux hommes, à l’univers, à vous, de la société, du bien, du mal, de l’univers, de la famine, de la consommation, de la pauvreté, de la richesse, du racisme, des guerres, de la sexualité, du Sida, de tout ce que l’homme a détruit. Elle raconte avec des gestes qui ne sont que de la danse, avec des silences qui ne sont que des sourires et des soupirs qui ne sont que des larmes. Tout devient limpide et grave, tout devient sombre et lumière. Nous sommes sur un terrain vague au bord du crépuscule, tout va exploser, tout va disparaître, Loretta ne veut plus vivre ces horreurs, elle fini par renverser la tasse et partir, ou plutôt sortir.

Les images et les paroles de Copi nous reviennent à la face, peut-être insupportables pour certains et évidentes pour d’autres. Copi fait une critique tranchante du monde impitoyable dans lequel nous vivons qui, si l'on ne connait pas son travail, peut choquer la sensibilité de certains.

Libre à chacun de forger sa propre interprétation, de faire et imaginer son propre voyage.

Avis de la presse

  • Je faisais office de critique dramatique dans un journal très BCBG, j’avais lu Les escaliers du Sacré-Cœurde Copi qui me faisaient penser tant dans le pathétique que dans la provocation à Pierre Gripari ou au Marquis de Sade, remarquez le saut à travers les siècles, quand je me retrouvai au Théâtre du Lucernaire pour voir Le frigo de Copi... Avec Copi dans le rôle titre et avec Copi pour toute distribution. Je ne sais même plus si j’ai été capable de rédiger ma critique : ce n’est pas le délire humain, trop humain de l’auteur au sujet des rats qui l’envahissent ni ses fantasmes sexuels trop nettement affirmées qui m’ont effarouchée. Une véritable angoisse m’a étreinte à la vue de l’implication quasi suicidaire de l’auteur-interprète. Il ne faisait rien d’exceptionnel, mais il était si vrai, si sincère que l’on craignait qu’il ne tombe du fil tendu entre réel et rêve en se fracassant corps et âme. Dans certaines outrances de Jacques Brel, dans la démesure de vie des certains membres du groupe des 26, j’ai cru percevoir cette même belle blessure qui nous fascine par le danger dans lequel survit celui qui se l’inflige pour nous en faire entendre le chant. Riez, ceci est ma chair affamée ; pleurez, ceci est mon désir assoiffé.

    Copi était un être délicat, au propre comme au figuré. Un elfe, quasi transparent, aux chevilles et aux poignées si fins qu’ils semblaient enfantins. D’une voix que l’on devinait polie et que l’on sentait ténue, il racontait les pires horreurs, les plus noirs cauchemars et l’on comprenait que cette horreur mêlée de fascination et de désir était sa vie, sa croix et son chant. Rien ne remplace la lecture d’un texte par son auteur, aussi maladroite soit elle. Rien ne me semblait pouvoir remplacer l’interprétation de ce seppuku artistique, cette mise à nu dont Copi était à la fois le torero et le taureau.

    Quand Hazem El Awadly m’a annoncé qu’il mettait en scène Loretta Strong, j’étais curieuse, impatiente de voir si quelqu’un d’autre que l’auteur pouvait tenter ce défi. L’histoire déjantée, affranchie de la spatio-temporalité, ce discours-fleuve d’une femme-constellation, dernière survivante et dernier témoin qui, à travers une communication hystérique, intime et pathétique, tente de sauver la vie ou du moins le verbe (au commencement était le verbe) dans le monde… Possible ? Naissant du nuage de tulle de son cocon-nid, Jefferson Eleutério, par son énergie, son implication totale… m’a ahurie, gênée et éblouie. Un si jeune comédien parvient, dirigé avec démesure et liberté, à restituer l’urgence, le pathétique, la tragédie de cette pauvre sublime dernière créature vivante qui, oppose, aux dangers cosmiques qui la menacent, son indestructible joie d’exister, le drapeau jamais en berne de sa sexualité délirante, mi-fantasmée, mi-dévorante. L’acteur est, dans sa beauté stupéfiante, loin de la gracilité d’un Copi mais, quelle surprise de découvrir dans sa passion, sa modestie et sa flamme intérieure une telle capacité à partager son intimité dans ce qu’elle a d’original, d’émouvant et de terrible. Les outrances de ce spectacle, auquel il ne faut pas amener les chères petites têtes blondes, est moins dans les poses exhibitionnistes (qui font partie de l’univers de Copi) que dans la souffrance, la terrible douleur d’être au monde seul, incompris et désirant. Et cela seuls les adultes pourront l’affronter, car ils la connaissent.

    Anca Visdei, à Paris, août 2011

     
  • Situé à l’Île-Saint-Denis, le théâtre Nout est un bel écrin qui a un cachet de petite Cartoucherie à l’orientale. Son directeur, Hazem El Awadly, a appartenu à la troupe d’Antonio Diaz à l’Épée de Bois. Depuis des années, l’animateur du lieu se bat avec toute sa passion pour le faire vivre. Sa programmation est basée sur des textes contemporains… Sa nouvelle création est Quareat Al Fengan. Cela ne vous dit rien, c’est normal, derrière se titre se cache Loretta Strong. Le texte de Copi est accompagné, en fond sonore, par deux chansons de l’Égyptien Abdel Halim Hafez, dont l’une a donné son titre au spectacle.

    Dans une mise en scène au cordeau d’Hazem El Awadly, le jeune comédien brésilien, Jefferson Eleutério, fait magnifiquement entendre ce cri de rage. Perdu dans sa folie, Loretta soliloque auprès d’êtres qui ne l’entendent pas. Un spectacle choc qui ne laisse pas « indifférent ».

    M-C.N., dans le Pariscope

     
  • Comment sauver cette vie et ce monde qui partent en charpie ? La critique et auteure de théâtre Anca Visdei qui a vu le spectacle Quareat Al Fengan d’après Copi, a été éblouie par le discours fleuve de cette figure charnelle, une vraie femme constellation. Le spectacle raconte la tragédie d’une pauvre et sublime dernière créature vivante : elle oppose aux dangers cosmiques qui la menacent son indestructible joie d’exister dont l’évocation passe par une sexualité délirante. Autour d’un verre d’eau et d’une tasse de café, Quareat Al Fengan ou Loretta – c’est du pareil à la même, car elle, c’est lui – lit dans le marc. La créature parle à la terre, raconte aux hommes et à l’univers tout ce qu’ils ont détruit, en dépit du bien et à cause du mal, de la famine, de la consommation, de la pauvreté, de la richesse, du racisme, des guerres, de la sexualité, du sida… Copi ne mâche pas ses mots pour accomplir une critique tranchante du monde dans lequel nous vivons. Anca Visdéi écrit : « Les outrances de ce spectacle, auquel il ne faut pas amener les chères petites têtes blondes, est moins dans les poses exhibitionnistes (qui font partie de l’univers de Copi) que dans la souffrance, la terrible douleur d’être au monde seul, incompris et désirant. Et cela seuls les adultes pourront l’affronter, car ils la connaissent. » Le comédien à la beauté stupéfiante joue d’une implication totale.

    Véronique Hotte, dans La Terrasse

     
  • Quareat Al Fengan est un solo inspiré de Copi. Travestissement réussi de Jefferson Eleutério, même si le propos extrême est à la limite du supportable.

    L’héroïne de Loretta Strong (1974) de Copi que l’auteur joua au Théâtre de la Gaîté Montparnasse apparaît aujourd’hui sur la scène du Théâtre Nout de l’Île-Saint-Denis, à travers le jeu travesti de l’acteur brésilien Jefferson Eleutério. Cette créature extraordinaire n’existe sur le plateau que dans « tous ses états » ostentatoires de figure hystérique extravertie, sur le bord d’une crise de nerfs, que rien ne semble pouvoir cesser de faire hurler. On ne peut prendre en charge selon la raison ce monologue en forme de récit intime et de dévoilement douloureux d’une intériorité meurtrie. Le portrait d’un homosexuel travesti est recréé de manière brute. Qui incarne cette histoire ? Un être en adoration devant son apparence fabriquée et inventée, comme s’il était en admiration d’un au-delà de soi ? De prime abord, les atours participent de cette image féminine en majesté : l’acteur travesti porte non sans élégance une robe somptueuse de tulle blanche bouffante, des gants blancs de soirée et une perruque à la chevelure bouclée. Mais les habits ne font pas la princesse qui n’hésite pas à soulever ses jupes pour que le public puisse en apprécier les dessous cachés, pudeur et honnêteté tout juste sauvegardées.

    Le comédien joue sa partition à la note près dans cette mise en scène insolite de Hazem El Awadly, sous la musique lancinante de l’Égyptien Abdel Halim Hafez, deux chansons fleuves dont l’une a donné son titre au spectacle. Mais Loretta est en colère et en souffrance, elle n’en finit pas de cracher au monde sa haine du monde, un univers qu’elle contemple à présent depuis l’immensité vide de la galaxie dans laquelle elle semble tourner infiniment, sans repère ni refuge, sans asile ni répit : « La Terre c’est pas une planète c’est une comète. Quelle merde ! » Des chauve-souris semblent tourner avec Loretta dans le désert du cosmos, à moins que ça ne soit des hommes singes : « ça m’apprendra à me faire prendre par des rats ! » ou bien « Comment voulez-vous qu’on baise ? Vous jouissez, ne râlez pas comme ça, on dirait qu’on vous égorge ! » Chair humaine explosée et collante, intestins, cervelle et cœur, le paysage fantasmé de Copi est viscéral au sens propre, procédant du verbe obsessionnel de la sexualité, de la maladie et de la mort, en passant par la digestion, la copulation, l’accouchement et autres bruits sourds ou fureurs corporelles. Plaintes, cris et chuchotements, et rires en cascade, le fiasco est éloquent : des images choc, accidents, guerres, tortures, sont diffusées au final, histoire de réfléchir un peu sur notre condition humaine. L’épreuve est d’ampleur, pour l’acteur comme pour le spectateur qui en sort perplexe.

    Véronique Hotte, dans La Terrasse